JE DEMANDE A VOIR AVANT DE DIRE OUI...................

Publié le par sectionpcfdefrontignanlapeyrade

Vers une indépendance magistrale de la justice ?

François Hollande l’a promis : avec lui, la justice sera plus indépendante. La présidence Sarkozy a été émaillée par une forte tension entre magistrats et pouvoir politique et la nomination de procureurs proches de la droite. L’alternance va-t-elle renverser la vapeur?


(Guibbaud - Pool/Sipa)
(Guibbaud - Pool/Sipa)
Jusqu’où Hollande peut-il rompre avec Sarkozy ? Des discours politiques à la pratique du pouvoir, il y a de la marge. Un des engagements de campagne du candidat socialiste fut la garantie d’une justice indépendante du pouvoir politique. Avec quatre grandes mesures : un droit de veto du CSM sur la nomination des procureurs, le CSM sera d’ailleurs lui-même réformé, un nouveau statut pénal du chef de l’Etat et la fin de l’intervention du ministre de la Justice dans les dossiers individuels.
Durant son quinquennat, Nicolas Sarkozy a souvent créé la polémique sur l’indépendance de la justice. Attaques contre les juges, nominations de procureurs proches de la droite comme François Molins, procureur de Paris, liaisons dangereuses entre l’Elysée et le procureur Courroye dans l’affaire Bettencourt… Christiane Taubira, nommée à la surprise générale ministre de la Justice (on attendait André Vallini), devra ramener le calme.
Premier chantier : réformer le mode de nomination des procureurs. Actuellement, ces derniers sont nommés sur avis simple du CSM. Mais le précédent gouvernement s’était engagé à respecter ces avis. Le nouveau gouvernement devrait inscrire cet engagement dans la loi en transformant cet avis simple en droit de veto.

Cette réforme va-t-elle éviter des nominations politiques ? En février, Hollande avait créé la polémique en laissant entrevoir une grand ménage parmi les hauts postes de la police et de la justice : « Ceux qui sont liés à ce système auront forcément à laisser la place à d'autres ». Parmi les procureurs visés : Philippe Courroye, procureur de Nanterre. Mais Hollande a démenti par la suite tout volonté de « purge » et d’ « Etat PS ».
Et même si le CSM obtient un droit de veto sur les nominations de procureurs, qui va proposer les noms ? Actuellement, c’est le ministre de la Justice qui désigne son candidat au CSM avant validation. Cependant, au sein de la magistrature, on souhaite que le CSM maîtrise tout le processus de nomination et propose sa propre liste. En février dernier, contacté par Marianne, André Vallini avait laissé la porte ouverte à une telle réforme. Mais vu que Vallini a été écarté de la Place Vendôme le chantier est réouvert.
D’ailleurs, c’est le CSM en lui-même qui devrait être réformé. Notamment sur la nomination de ses membres. Ces derniers devraient avoir l’aval d’au moins 3/5ème des commissions des Lois de l’Assemblée et du Sénat. Jusque là, le seuil des 3/5ème valait pour refus et non acceptation du candidat. Un point va se révéler plus sensible : la « parité » entre magistrats et non-magistrats au CSM. André Vallini défendait une telle position. Reste à savoir ce que va faire Taubira.

Plus d'intervention du pouvoir ?

Deuxième chantier : l’intervention du ministre de la Justice dans les affaires individuelles. Rachida Dati s’était dite « chef des procureurs », Michèle Alliot-Marie avait demandé au parquet général de Paris de faire appel lors du procès du Gang des barbares contre l’avis de l’avocat général Philippe Bilger. Ces pratiques devraient cesser sous Hollande. Christiane Taubira l’a promis vendredi sur France Info : « Le Garde des Sceaux n’a aucune raison d’intervenir dans des dossiers individuels » parlant d’une « obligation constitutionnelle ».
Pour autant, si la Constitution dit bien que « le Président de la République est garant de l'indépendance de l'autorité judiciaire », le droit n’interdit pas au ministre d’intervenir dans les affaires en cours. Le Code de procédure pénale dans son article 30 précise que le Garde des sceaux peut « enjoindre » aux procureurs généraux « d'engager ou de faire engager des poursuites ou de saisir la juridiction compétente ».
Le même article dit aussi que le ministre « adresse aux magistrats du ministère public des instructions générales d'action publique » dans le cadre de sa politique pénale. L’article 39-1 précise lui que le procureur « anime et coordonne (…) la politique de prévention de la délinquance dans sa composante judiciaire, conformément aux orientations nationales de cette politique déterminées par l'Etat ».

Dilemme de l'indépendance

Au delà du mode de nomination, c'est cette possibilité pour le ministre de la Justice de donner des consignes individuelles et générales aux procureurs qui concrétise la soumission hiérarchique du ministère public. Si Hollande veut une indépendance totale des magistrats, il devra réformer ces dispositions.
Alors jusqu'à quel degré peut-on séparer le politique et le judiciaire ? C’est un éternel dilemme, la nécessaire indépendance de la justice s’oppose parfois et même souvent au principe de souveraineté populaire. Par exemple, est-ce que les parquets peuvent refuser de poursuivre devant les tribunaux les usagers de cannabis alors que c'est une directive du gouvernement ? Un ministre de la Justice peut-il se priver des moyens d'appliquer sa politique pénale ? C'est tout une conception du statut du procureur qui doit être revue.

Deux théories s'affrontent : d'un côté, on voit les magistrats du parquet comme des « avocats de la société », avec un statut différent des magistrats du siège (les juges), censés être des arbitres impartiaux, et dans ce cas, rien ne s'oppose à leur soumission à l'exécutif. De l'autre, on souhaite aligner le statut des procureurs et des juges comme autorités judiciaires indépendantes et dans ce cas, tous les ponts entre magistrats et pouvoir exécutif doivent être coupés. Le débat est donc bien plus complexe que Hollande semble vouloir le faire croire.

Publié dans INFORMATIONS NATIONALE

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